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La plongée en haute mer

Une des premières choses que Philippe Bouchet, investigateur principal de l’expédition Walters Shoal avait dite durant une réunion en Janvier était : « la priorité ira à la plongée ».

En effet, pour identifier les spécimens de mollusques, de crustacés et d’algues au labo et effectuer de la recherche et de l’analyse ADN, il faut d’abord récolter des échantillons sur le fond océanique. Les plongeurs scientifiques s’en chargent, en récoltant à vue, en brossant des rochers ou du substrat ou en aspirant littéralement un mètre carré du fond à la fois.

Comme le mont océanique Walters est très peu profond, par endroits culminant seulement à 18 mètres de profondeur, l’équipe du Muséum d’Histoire Naturelle de Philippe Bouchet a pu organiser ces plongées jusqu’à une profondeur maximale de 50 mètres. On atteint différents endroits stratégiques tout autour de la montagne submergée, avec l’aide d’une vedette rigide, capable d’emmener 4 plongeurs à la fois, sur des sites identifiés par l’équipe pélagique et les données de bathymétrie, si les conditions météo le permettent.

Je me suis souvenu de ma réaction, et je me disais, c’est génial, on va descendre sur une montagne submergée au milieu du Sud-Ouest Océan Indien, et probablement être parmi les premiers à découvrir le monde sous-marin de ce lieu extrêmement isolé avec ses caractéristiques exceptionnelles. En tant que vidéaste sous-marin, l’idée de filmer cet endroit unique paraissait très intéressante.

Mais les aspects vraiment sérieux de la plongée en haute mer sont évidents. Un post de blog précédent le mentionne, le R/V Marion Dufresne a un caisson de décompression, un médecin spécialiste hyperbare, et des procédures de sécurité bien établies. L’environnement marin comporte bien des risques, et parmi eux le premier étant les courants, qui peuvent être horizontaux ou verticaux et totalement imprévisibles.

Durant mes trois premières plongées, il fallait systématiquement éviter la colonne d’eau. Il faut être au fond, ou sur la surface en train d’entrer ou de sortir de l’eau. Lorsqu’un mouillage est déployé, les paliers de décompression sont plus faciles et tenir la corde constitue la ligne de vie du plongeur. Chaque plongeur a un GPS, qu’il peut activer en surface s’il est hors de vue, pour signaler sa présence aux navires autour jusqu’à 30 milles marins. On respire de l’air, et de l’air enrichi (Nitrox 40%) qui constitue un mélange additionnel pour aider à la désaturation à la remontée. Pour monter à bord de la vedette, elle est grutée à l’eau et on descend de 10m l’échelle de pilote.

Une fois tous ces aspects bien compris par tout le monde, tout devient très sympa. J’utilise un appareil Sony RX100 IV avec caisson Nauticam, objectif grand angle et 2 lumières vidéo Fantasea, pour capturer l’environnement marin unique, principalement composé de corallines, d’algues et de poissons subtropicaux. L’eau est à 20˚C.

On voit des requins d’une espèce non identifiée au loin, ainsi que des rascasses, des mérous et des murènes. Les ‘seamounts’ sont des montagnes sous-marines, des ‘hotspots’ de biodiversité et des phares de vie pour les mammifères marins, les poissons migrateurs et les oiseaux dans l’océan si vaste. Plonger dans les eaux internationales, la haute mer, est quelque chose d’encore plus spécial. On plonge, on apprend sur l’héritage commun de la planète, qui vaut la peine d’être protégé. Les images peuvent parler d’elles-mêmes.

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